‘Een sprong in het duister, ja’

Nieuws | de redactie
14 mei 2010 | Jacques-René Rabier was er in 1950 bij als de jonge kabinetschef van Jean Monnet, de 'Inspirateur' van Europa. Precies 60 jaar nadien huldigt en analyseert hij de lancering in mei 1950 van het 'plan Schuman', waarmee de visie van Monnet werkelijkheid kon worden.



“Loin de moi la prétention de me comparer à Goethe, qui auraitdéclaré en septembre 1792, au soir de la bataille de Valmy entreles armées françaises et prussiennes: Ici et aujourd’huicommence une ère nouvelle de l’histoire du monde, et vous pourrezdire que vous y avez été.

Ce que je peux dire en parlant du 9 mai 1950, c’est que, à 16heures, dans le Salon de l’Horloge du Quai d’Orsay, à Paris,lorsque Robert Schuman lut devant la presse française etinternationale sa fameuse “Déclaration”, j’y étais.

Oserais-je ajouter, paraphrasant Goethe, qu’une ère nouvelle del’histoire du monde commençait ce jour-là ?  Une èrenouvelle de l’histoire de l’Europe, certainement…

J’étais, à l’époque, âgé de 30 ans, directeur du cabinet de JeanMonnet au Commissariat général du Plan de modernisation etd’équipement, un organisme public qui réunissait dans un travailcommun chefs d’entreprise, syndicalistes, hauts fonctionnaires etexperts indépendants. 

Je n’étais pas présent dans la toute petite équipe qui, lessemaines précédentes, travaillait discrètement, auprès de Monnet, àce qui allait devenir la “Déclaration Schuman”, mais j’étais enrelations quotidiennes avec cette petite équipe : EtienneHirsch (qui deviendra plus tard président d’EURATOM), Pierre Uri,économiste (qui, plus tard, travaillera auprès de [Paul Henri]Spaak, à Val Duchesse, lors de la préparation des traités de Rome),Paul Reuter, professeur de Droit public à Aix-en-Provence, etquelques autres. Tous ont quitté ce monde, comme Schuman etMonnet.

Monnet-Schuman: je serais tenté de mettre un trait d’union entreces deux noms. J’aime à dire et répéter, en une brève formule quiexprime exactement la réalité historique : “Sans Monnet, iln’y aurait probablement pas eu de ‘Plan Schuman’, mais, sansSchuman, le projet élaboré par Monnet et son équipe, en relationavec un proche collaborateur de Schuman, Bernard Clappier (luiaussi disparu), serait probablement resté dans les ‘archivesmortes’ du ministère français des Affaires étrangères…”.

Monnet fut “l’Inspirateur” – le mot est du Général DeGaulle – et Schuman l’homme politique, le ministre, qui eut laclairvoyance et le courage de prendre en main le projet Monnet, dele présenter, le matin du 9 mai, au Conseil des Ministres français,après l’avoir officieusement communiqué au Chancelier Adenauer. Lesdiplomates avaient été tenus à l’écart  jusqu’à cette date. Jen’aurai pas la malice d’ajouter que ce fut peut-être un facteurnon-négligeable du succès de l’opération.

Robert Schuman présente son projet à la presse, au nom dugouvernement français, dans l’après-midi du mardi 9 mai. Il n’estpas exagéré de dire que cela eut immédiatement un grandretentissement. On peut le constater en consultant la presse desjours suivants : les journaux français évidemment, mais aussila presse des autres pays, en  Europe de l’Ouest et de l’Est,aux Etats-Unis et en Union soviétique.

Les réactions gouvernementales ne tarderont pas :immédiatement positives dans cinq pays, qui deviendront, avec laFrance, les fondateurs de la Communauté européenne, prudentes etréservées au Royaume-Uni. Dans chaque pays de l’Europe de l’Ouest,les réactions furent différentes selon que ceux qui s’exprimaientappartenaient à la majorité gouvernementale ou àl’opposition.

En bref, l’effet de surprise fut général, marqué chez beaucoup parl’espoir de sortir de “l’après-guerre” et de dissiper quelque peules risques de “guerre froide”. Néanmoins, de nombreuxcommentateurs s’interrogeaient sur ce qui allait advenir de cetteproposition inattendue selon les critères de la diplomatietraditionnelle.

On raconte qu’à la sortie de la conférence de presse du 9 mai un journaliste demanda à Schuman :  “Mais,Monsieur le Ministre, ce que vous proposez, c’est un saut dansl’inconnu…“. “Oui, aurait  malicieusementrépondu Schuman, vous avez raison, c’est un saut dansl’inconnu…”. 

Nous ne rappellerons pas ici dans quelles circonstances politiquesinternationales ce “Plan Schuman” surgissait. Il y a d’excellentstravaux d’historiens à ce sujet, notamment, pour n’en citer qu’un,qui fut le premier, une brève étude du Professeur Pierre Gerbet(décédé l’an dernier), sur La Genèse du Plan Schuman.Cette étude, publiée en 1956, a été rééditée en 1962 par laFondation Jean Monnet pour l’Europe, de Lausanne.

Certes, l’idée d’une réconciliation franco-allemande, et même d’uneaction portant sur les industries du charbon et de l’acier, étaientdans l’air du temps. Certes, existaient déjà l’Organisationeuropéenne de coopération économique (1948) et le Conseil del’Europe (1949). Certes, sans remonter à un lointain passé, desprojets – ou des rêves – d'”Union européenne”, voire d'”Etats-Unisd’Europe” (Churchill, 1946), avaient récemment circulé, mais rienn’avait pris la forme concrète et opérationnelle du PlanMonnet-Schuman:

  • un marché commun pour le charbon et l’acier, industries de basedans la paix et pour la guerre ;
  • une autorité commune, qualifiée de “supranationale”,
  • un projet politique à plus long terme, puisque la Déclarationdu 9 mai 50 se terminait par ces mots que l’on peut rappeleraujourd’hui, avec nostalgie ou comme une anticipationmythique : “Par la mise en commun de la production de base,l’institution d’une Haute autorité nouvelle, dont les décisionslieront la France, l’Allemagne et les pays qui y adhéreront, cetteproposition réalise les premières assises d’une fédérationeuropéenne indispensable à la préservation de la paix”.

9 mai 50, Monnet-Schuman: “eine neue Epoche derWeltgeschichte“? Je laisse la réponse aux plus jeunesgénérations.”

[bron: EurActiv.com]


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